Irlande : grandes manoeuvres des partisans et adversaires de l'avortement avant le référendum
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Plusieurs dizaines de milliers de manifestants sont attendus dans les rues de Dublin samedi, pour la 6e marche annuelle organisée par les partisans du droit à l’avortement, avec, en ligne de mire le référendum annoncé par le gouvernement.
Ce sera “une démonstration de force pour montrer au gouvernement que nous ne soutiendrons rien d’autre qu’une abrogation intégrale du 8e amendement”, a promis Linda Kavanagh, porte-parole de l’Abortion Rights Campaign (Campagne pour le droit à l’avortement), au cours d’une conférence de presse en amont du défilé.
Cet amendement, introduit en 1983 et qui place à égalité la vie de la mère et du foetus, a intégré dans la Constitution du pays à forte tradition catholique l’interdiction totale de l’avortement. Décrié par les pro-IVG, il a été légèrement assoupli en 2013, après la mort d’une jeune femme enceinte. Depuis, l’avortement peut être pratiqué en Irlande en cas menace vitale pour la mère.
Face aux revendications de plus en plus fortes des pro-IVG, le gouvernement avait convoqué en novembre une Assemblée des citoyens, chargés de réfléchir à des sujets de société, dont le 8e amendement. Dans ses conclusions rendues en avril, ses 99 membres ont recommandé une libéralisation assez large de l’IVG sous 12 semaines de grossesse.
Mardi, Dublin a annoncé la tenue d’un référendum sur la question au printemps 2018. Mais alors qu’une Commission parlementaire transpartisane a commencé à plancher sur la question qui sera posée aux Irlandais, les défenseurs de l’actuelle législation sont aussi sur le pied de guerre.
– Un opinion partagée –
Des militants anti-IVG ont manifesté mercredi devant Leinster House, la chambre des députés. Et samedi, ils entendent tracter dans les rues des grandes villes pour appeler au statu-quo.
“Nous avons toutes les raisons d’être fiers du 8e amendement qui a sauvé des dizaines de milliers de vies et évité d’horribles violations des droits de l’Homme que l’avortement a causé dans d’autres pays”, affirme Cora Sherlock, porte-parole de la Pro-Life Campaign (Campagne Pro-Vie).
Tim Jackson, jeune consultant en marketing de 28 ans, a observé jusqu’à mercredi une grève de la faim de dix jours pour réclamer, sans succès, que les députés regardent une vidéo montrant un avortement. “C’est important, pour avoir un débat éclairé, que ces députés sachent ce qu’ils sont sur le point de décider”, dit-il, affirmant ne pas leur faire confiance.
La défiance est partagée par les pro-avortement. Satisfaits d’avoir enfin obtenu l’organisation d’un référendum, ils jugent le gouvernement et les parlementaires irlandais trop frileux sur la question et dénoncent régulièrement une influence encore trop grande de l’Eglise catholique sur les affaires publiques.
Contrairement au référendum sur le mariage homosexuel -adopté en mai 2015-, aucun responsable politique de premier plan n’a pris position pour un droit large à l’IVG. La presse se fait même plutôt l’écho de ministres embarrassés à l’idée de défendre un référendum dont les termes favoriseraient une option trop libérale, à l’image d’une opinion encore partagée, prête à accepter l’avortement en cas de viol (76%) mais opposée à une IVG à la demande (67%) selon une récente enquête Ipsos/MRBI.
Le Premier ministre Leo Varadkar juge lui la législation actuelle “trop restrictive” mais n’est pas non plus favorable à une légalisation totale.
“Je pense qu’ils manquent de courage pour affronter la réalité et la pression de leurs électeurs qui sont peut-être plus âgés et plus conservateurs dans leurs circonscriptions”, déclare Bríd Smyth à l’AFP. L’élue du petit parti Solidarity a été la première députée, en juillet, à révéler qu’elle avait avorté lorsqu’elle était plus jeune.
Selon elle, “l’avortement est une réalité même en Irlande, c’est juste une réalité qu’on exporte chaque jour”. Référence aux milliers d’Irlandaises qui vont chaque année se faire avorter à l’étranger, notamment au Royaume-Uni.
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